mardi 28 septembre 2010

Proverbe du jour

Mon père a appris ces deux proverbes en Bretagne, qui m'inspirent bien alors que je suis à Tokyo en plein dans la pluie.

"Quand le goéland se gratte le gland, il fera mauvais temps"

Cette phrase ma foi fort poétique s'enchaîne avec la suivante:

"Mais quand le goéland se gratte le cul, il fera pas beau non plus"

A méditer... (vivement que les cours reprennent)

Histoire de porte (poèmes de 2006)

Ce sont de vieux poèmes que j'ai publié en 2006 dans un ancien blog de poésie que je tenais avec deux amis à moi (http://without.canalblog.com/) . Ils ont été écris dans une période où j'étais fasciné par l'hermétisme (Mallarmé, Rimbaud, Bonnefoy) ...sans vraiment comprendre ce que c'était (la gaucherie de ces poèmes en témoigne fort bien). Cependant, quelques phrases sont pas mal, donc les voilà.

 

La porte qui grince


I

Les voiles de la transe
Doucement susurrent
A la nuit que toutes ses portes s'ouvrent
Vers le clapotis?

Doucement susurrant
Finalement
A la nuit car
Quand les voiles en transe
Entre de nouveau dans la danse
Les portes s'ouvrent
Vers le clapotis
Du vertige
Du ruisseau
Les portes doucement s'ouvrent
Et quand les voiles, en transe
Font éclater l'amour
Les pages se succèdent
Et le clapotis qui
Lentement susurre
S'engouffre et traversant le ruisseau
Croise le géant
Qui d'un mot...

Les voiles amassés et les portes ouvertes
Le ruisseau coulant et le géant passant
Considérablement
Le bruit d'une voiture
Trouble affinement
L'onde de la porte qui fermée
Respire tranquillement

II
Les voiles de la transe
Doucement susurrent
A la nuit que toutes ses portes s'ouvrent
Vers le clapotis?

Poésie avant toute chose
Qui rime encore comme du cristal
Se perd dans la nuit diamétrale
Des portes qui doucement s'entrouvrent

Le souffle perd sa force
Qui susurre, doucement
Luit au quart d'heure de tes lèvres
Aboli objet de mes illustres bruits

Les voiles de la transe suggèrent des clapotis
Ou le perdu se doit de couler avec lui
Et le géant se lâche dans le catimini
De la porte muette qui se ferme sans bruits



La porte qui claque


Les voiles de la transe
Par des vagues de vent
Se déchirent quand Zéphir
Fait claquer les portes

Comme un ballet
Par intervalles réguliers
Battent les voix du crépuscule
Qui susurrent à la nuit:

"A demi mots et en quart de coeur
Sortez de votre torpeur!
Âmes maudites! perdues dans le bois
Que tout te perçoit."

Violemment la porte se ferme sur ces incertitudes
Qui reviennent en courant se placer au miroirs
Marquant le début des déboires
Des portes s'entrechoquant...

lundi 27 septembre 2010

L'amour est dans le train

Pendant que le train avance dans la nuit, je suis assis sur un siège bien propre et je commence à m'endormir en voyant passer les stations.

(tous les témoignages parmis diverses personnes qui ont été recueillis sont vrais)
新宿(Shinjuku)
The doors on the left side will open. Please mind the gap.

Témoignage:"Wake up. grab a brush and put a little make up. hide the scars to fade away the shake up."


         J'ai raccroché le téléphone. Je n'aime pas le téléphone, c'est moins bien qu'en vrai, mais bon, en vrai ce n'est pas clair non plus et puis c'est dans longtemps, trop longtemps. L'amour n'attend pas. C'était une des choses les plus dures de ma vie: rompre. Enfin, j'ai rompu de mon côté, sans artifice, sans sacralisation et surtout pour éviter la précédente, pleine d'incertitudes. Juste "ras-le-bol": les incertitudes minent mon estime personnelle, font monter l'espoir. Je ne traînerai plus derrière, je suis fatigué, l'Amour m'a fatigué. Rien n'est perdu bien sûr, car c'est une petite flamme précieuse, un secret que je garde au fond de mon coeur, l'éternel espoir du "un jour" qu'on doit ranger dans une petite boite parce que ça ne dépend plus de nous-même. Il faut cependant arrêter d'aller chercher l'amour quand celui-ci s'enfuit, pour des milliards de bonnes ou mauvaises raisons, de vos mains tremblotantes. Ces choses là marchent dans la réciprocité. Prendre ses distances, peut-être pas définitives enfin ça j'en sais rien, mais ne pas revenir quémander. Avancer plutôt.  
      Cette troisième année d'étude à l'étranger est une année particulière car elle questionne beaucoup le thème de l'amour. Tous les couples se posent la question de la troisième année, se posent la question de rester ensemble ou pas. Certains éclatent, d'autres résistent, se transforment, ou s'effritent. Il n'y a pas de recette miracle contre la jeunesse qui avance, contre le mystérieux temps qui passe. L'Amour, le sexe, l'attirance, l'amitié: on a beau avoir 20 ans, ces problèmes ne sont jamais simples et ne le deviendront jamais.



三鷹 (Mitaka)
The doors on the left side will open. Please mind the gap.

Témoignage: "La nuit était parfaite et froide, l'Hotel de ville très lumineux, l'ambiance parfaite à l'amour. Je me suis approché pour l'embrasser et l'autre a reculé d'un pas, de peur de se faire frapper au coin de la rue."

Aimer c'est dur. Aimer c'est questionner la liberté. Quand on aime, est-ce qu'on est moins libre ou pas? Est-ce qu'on s'enchaîne ou est-ce qu'il nous donne des ailes? Et puis pourquoi y'en a toujours un qui aime plus que l'autre? Pourquoi on cherche tous une personne qu'on aimerait assez pour se sentir enchainer, alors que l'autre, ça lui fait peur? Je pense que de telles questions sont sans fin. Il faut le vivre de façon existentielle plutot qu'essentielle. L'Amour n'est rien sans liberté et existence. L'Amour se vit avant de se penser et n'existe que lorsqu'il peut s'épanouir sans se poser de question.

Vous me direz: mais j'aime librement ma femme, je ne me cache pas, et pourtant parfois je doute de mon amour? Oui vous avez sûrement raison, car l'Amour n'est qu'un marshmallow gluant qui s'adapte aussi à nos humeurs et découvertes. Mais essayer d'aimer sans liberté, et vous verrez que votre amour périra aussi vite que la flamme d'une bougie dans un ouragan.


たしかわ (Tashikawa)
The doors on the left side will open. Please mind the gap.



Témoignage:"Encore une fois nous nous sommes réveillé à 5 heures du matin pour quitter mon appartement. Personne ne devait nous voir."

On parle souvent de l'amour entre un homme et une femme. On nous a toujours bassiné avec les contes de fée et toutes ces conneries faites quelque part pour consolider un idéal bourgeois et reproducteur de cette espèce virale que constituent les humains. Mais en vérité, l'exemple des amours homosexuelles, des amours alternatives, ne nous montrent-elles pas mieux la question de l'amour et de la liberté? Parce que l'alternative, elle a pas toujours le droit de faire tout ce qu'elle veut...

Aimer, certains le vivent comme un poids essentiel. "Je suis une femme et je ne peux tomber amoureuse que de femme." "Je suis un homme et je ne peux tomber amoureux que d'hommes." Quand on est homo, l'amour semble déjà moins libre. Quand on ne peut choisir rien d'autre, aimer c'est au départ un calvaire.  Et puis il y a les bisexuels. Certains homo n'aiment pas les bi, parce qu'ils disent que ceux-ci se retourneront toujours vers la facilité. Hors, très logiquement, on peut dire qu'être bi c'est aussi difficile que d'être homo. Quand on est bi, l'amour devient un cauchemar de choix, et on devient une machine à aimer. Aimer universellement n'importe quel sexe: cela fait de nous une personne indéterminée, ne sachant jamais sur quel pied danser, incapable de s'associer à des schémas précis. Aimer sans cesse sans comprendre. L'amour libre est aussi un calvaire. Et sur le plan existentiel, c'est pareil: quand on aime quelqu'un du même sexe que le sien, on s'expose à la même situation que quelqu'un qui ne peut pas choisir. Il s'agit de prendre finalement le pli d'un amour alternatif, que la société, dans sa bienséance, n'accepte toujours pas très bien.




埼玉県 (Saitama ken)
The doors on the left side will open. Please mind the gap."Pendant que j'étais couché sur ses genoux, un homme d'affaire allemand est passé devant nos sièges et a dit d'une voix agacée, en levant les yeux: "nein, nein, nein".

 Dans ses yeux, j'ai vu des millions d'étoiles, mais aussi des gros nuages noirs. Des kaléidoscopes de lumière qui s'emmêlent à la noirceur, à l'incertitude. Et qui font ressortir ma propre noirceur, mes propres incertitudes. Partir quelque temps, ou pour oublier un peu les étoiles, ou pour en trouver d'autres, moins brûlantes et brillantes, mais peut être plus calmes, plus sereines.


吉祥寺 (Kichijouji)
The doors on the left side will open. Please mind the gap.Témoignage"S'aimer dans le salon, devant les grandes fenêtres glacée, sur le tapis quand soudain  on panique: le voisin pervers nous a peut être vu?"

On aime d'abord un corps. On l'aime partout ce corps et on tombe à la renverse. On le prend partout, le mâche, le renifle. Il n'y a plus de normes sociales, il n'y a que l'amour qui prend tout et s'en va. Ravagé, d'avant en arrière, plus on avance, moins on comprends, on s'enchaîne, on ne comprends plus, on se perd, on sourit sans comprendre. Aller-retour. Aller-retour. Aller-retour. Perdu dans l'instant, le temps n'a plus d'importance. Le corps est un corps: qui pose sur lui les normes orthodoxes est un fou! Le désir parfois s'en va, parfois revient. Mais c'est toujours ce corps. Par amour, le corps devient un corps, et tout ira bien.

Témoignage: "On m'a pourri ma première année à Sciences po parce que j'ai eu le malheur de tomber amoureuse."

四ツ谷(Yotsuya)
The doors on the left side will open. Please mind the gap.
Témoignage: "Il est une heure du matin. Les yeux pleins de sommeil, je marche pour aller discrètement retrouver l'amour bien au chaud. Mais il fait vraiment froid dehors, et les voitures ne sont pas nombreuses."

Les confessions d'un fou dans un asile ont parlé: "Je me suis posé là, je lui ai tout dis, et puis j'ai attendu la sentence. Quand elle est tombé, fou de joie, j'ai couru à ses lèvres pour l'embrasser, et je n'ai même pas eu l'impression de faire un sacrifice". Le fou a alors commencé à prendre une feuille de papier, a déchiré quelques morceaux pour les manger, ses pensées faisant les mêmes tours avec obsession dans sa tête.

六本木 (Roppongi)
The doors on the left side will open. Please mind the gap.

Témoignage: "Pour la première fois, j'ai écris qui j'étais sur la neige près d'un pont quand soudain je l'ai effacé pour que personne ne me voit. J'avais le coeur tout serré."

Assumer. L'amour est dur à assumer je pense. Il est dur d'assumer et de dire à quelqu'un qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime plus. C'est presque aussi dur je pense. Être dans l'incertitude, ne pas savoir quelle réponse assumer, être perdu mais en même temps avancer. Pourquoi prendre une décision si elle est définitive? Il n'y a rien de rédhibitoire dans les relations humaines. Les hommes sont des êtres contigents, tout change entre nous tous. Mais il faut avancer, sans l'autre. C'est souvent plus dur pour l'un des deux. Mais les chemins sont beaux plus loin, dans les champs où poussent de grosses fleures violettes qui ont l'odeur de moutarde.

Le train passe, le train passe. J'ai le coeur qui se serre et des vertiges. おわりますか. L'un aurait dit: "mais vous vous êtes dits ça par téléphone, ça veut rien dire. Quand l'un sait plus où il en est, il faut avancer et lui laisser du temps." L'autre aurait dit: "Parfois entre les hommes, la parole devient tragique. L'un parle et l'autre entend autre chose. Il faut briser ce qui est tragique et avancer." Avancer, avancer, avancer.

Témoignage: "J'ai arrêté de me mutiler quand j'ai compris que j'avais le droit d'être amoureux."

武蔵境 (Musashi sakai)
The doors on the left side will open. Please mind the gap.

Témoignage: "Mais ils ont le droit de faire ce qu'ils veulent, tant qu'ils n'ont pas d'enfants et qu'ils ne se montrent pas trop en public. C'est qu'ils pourraient faire peur à nos petits, voir même les corrompre".

Ne pas pouvoir aimer librement, c'est ne pas pouvoir aimer tout court.
...Non, la condition des amours alternatives n'avancent pas vraiment! Merci TF1. Merci la France, qui en retard sur beaucoup de pays d'Europe, n'a toujours pas légalisé le mariage homosexuel et l'adoption. Parce qu'il faut se retenir hein? Parce que c'est moins naturel qu'une fécondation in-vitro faite par une femme célibataire qui a recour à un don de sperme? Parce qu'il faut retenir des sentiments pour le bon plaisir d'une foule bien pensante, de la gentille foi judéo-chrétienne? Parce qu'il faut se retenir d'avoir le coeur qui se sert quand on voit une poussette et une famille heureuse? Parce qu'il faut se retenir d'avoir les larmes aux yeux quand on voit un couple s'embrasser sans réfléchir? Parce qu'il faut se retenir d'avoir les boules parce qu'on hésite à prendre un hôtel en vacances? Parce qu'il faut se retenir de souffrir de voir quelque chose de normal et de puissant ranger dans un placard plein de poussière et de honte? Se retenir oui: "retiens toi, tu verras, à 20 ans, ça te passera". Non, ça ne passe pas. L'amour ne passe pas Monsieur, l'Amour ne passe pas Madame. L'amour est là, présent, compressé par une société qui fait semblant d'accepter mais qui a les crocs affûtées. Une société qui n'est pas homogène, qui frappe la différence et qui montre que les taux de sida n'augmentent que chez les homosexuels, sans aucune nuance! L'amour n'est pas libre dans notre société Monsieur! L'amour n'est pas libre, Madame. L'amour reste toujours une luciole que l'on enferme dans une lanterne, pour faire croire que la beauté s'épanouit dans le monde, alors qu'on l'étouffe à petit feu, doucement, doucement.



武蔵小金井(Musashi Koganei)
The doors on the right side will open. Please mind the gap. Please don't jump in front of the train. Please dry your eyes. Please hang on, please.

"Chérie je t'aime, chérie je t'adore"

Petite poupée russe qu'on a laissé enfermé dans la grande, personne ne t'a laissé vivre et t'épanouir. Puisses tu rester dans un petit coin de mon cerveau, pendant que je fais ma vie sans trop regarder comme tu vis aussi. Tes joues sont des poignées de sable que je ne peux saisir, que tu ne peux saisir.  Car l'Amour se prend, s'envole et se perd, revient parfois. Je vois rien, tout est sombre, dit, tout est sombre. Mais comme le train, j'avance toujours vers des destinations, qui pour seule différence, n'ont pas vraiment de noms. Est-ce que c'est toi, dit, qui voit la lumière? しらない、じらない. Peut être qu'on recroisera le chemin, ou pas. Pour l'instant, avançons, en boitant un peu, sortons de la station de train, rentrons dans nos chambres, et dormons. Pour réaliser nos rêves. 

vendredi 24 septembre 2010

演劇が好き

(Petite introduction pas en rapport avec le sujet-tudududu imitant le bruit du métro à Tokyo)

Je viens de redécorer ma chambre. C'est qu'elle était un peu austère la bougre! Cette année, j'ai obtenu une chambre dans un dortoir qui se situe dans un quartier de Tokyo (en fait je sais même si on peut dire que c'est dans Tokyo) qui s'appelle Koganei.



First thing first: c'est un dortoir de l'Université de Sophia. Il y a a peut près plus de Japonais que d'élèves internationaux (enfin d'Américains, il y a vraiment beaucoup beaucoup d'Américains). Deuxième chose: c'est un dortoir de mÂÂÂÂles. Le sexe opposé, fruit défendu, est donc cruellement absent. Couvre feu à minuit, expulsion immédiate si vous amenez Bobone à la maison pour prendre le thé (ou pas) , absences nocturnes qui doivent être signalées sur une fiche à l'entrée: Pas de doute, nous sommes bien au 21ème siècle. En revanche, aller comprendre pourquoi, on a le droit de boire dans les chambres. C'est ignorer deux choses: depuis Hélène de Troie, il n'a jamais été prouvé que les femmes amenaient autant la bagarre qu'une bonne chouille. Deuzio, c'est pas parce qu'il n'y a pas de filles que les garçons deviennent des anges. Bref, vous aurez compris que des petits archaïsmes hantent les couloirs de Koganei. En tout cas, l'ambiance reste bonne. J'aime bien les dortoirs. C'est sympa de manger à heure fixe avec des gens et d'essayer de parler de Kyushu avec un Japonais terrorisé dans un anglais approximatif (enfin pas pour moi, car je lui répondais dans un japonais tout aussi approximatif, héhé).



Comme je le disais donc plus haut, j'ai redécoré ma chambre. Je l'ai mise au couleur de l'Inde, avec deux ou trois tissus et posters que j'avais ramené de là-bas (siiiight). Ensuite, je me suis attaqué à la période nostalgie: photo des amis et des parents, cartes postal de Berlin, Hanoi, Bangkok ou Bruxelles, histoire de rendre cette chambre vivable. Pourquoi je vous dis tout ça. C'est parce qu'au moment où je vous écris, il y a une photo d'une troupe de théâtre et qu'elle me met plein de souvenir dans ma tête.


J'avais envie d'en parler un peu, de cette troupe de théâtre qui n'a pas de nom. Je pense à elle assez régulièrement en fait, comme un bon souvenir qui ne voudra jamais s'éteindre. J'ai toujours fait du théâtre à l'école, depuis la 6ème. J'aime bien le fait de pouvoir vaincre sa timidité. Je suis timide en général, mais pas avec le théâtre: il y a quelque chose de rassurant, un masque réconfortant, et surtout un sentiment de se purger, d'aller au devant de soi. Quand je suis arrivé au Havre, dans la pluie et l'effarante difficulté de la nouveauté, je suis entré dans l'atelier théâtre et là (attention lumières), ben ça allait quand même mieux. Non, en fait, ce qui m'a plu, c'est le fait que des élèves puissent créer seuls quelque chose de bien, puissent faire des cours par eux même. Marion avait commencé, et j'ai su dès la première séance que je voulais le reprendre quand je passerai en deuxième année. Aude et moi avons donc repris l'atelier, avec plein de doutes mais beaucoup de motivation.

C'est un véritable plaisir: écrire un cour, penser un cour, voir un cour se faire sous vos yeux, voir les gens vous faire confiance. Je ne crois définitivement pas aux essences: on ne nait pas metteur en scène ni prof de théâtre mais on le devient. En fait, le plus important est de se construire une autorité, et pour les autres, et pour soi-même. Avec Aude, au début, on a galéré. Servir de prof à nos amis, c'était pas facile. C'était gagner une confiance que nous n'avions pas encore tout à fait nous même. Mais au fur et à mesure, c'est venu. Madame Schwarz est venue consolider notre projet, on a vite trouvé des idées de pièces et nous nous sommes rapidement adaptés pour le minicrit.

Cette année est passée à la vitesse de la lumière. Engueulades, rires, questions, théâtre, théâtre, théâtre. Le théâtre m'a empéché de penser à l'année qui se passait, aux grands changements dans ma vie, à mon champ de bataille émotionnel. Il me mettait dans un stresse constant, mais dans un bon stresse. Le stresse de voir ce qui se passe dans ma tête arriver sur scène. Le stresse de voir que ce qui arrive dans ma tête peut être modifier par les autres. Ce que j'ai aimé dans cette expérience, c'est de voir à quel point les projets artistiques peuvent être démocratiques et ont besoin des autres. Ces deux pièces de théâtre, même si Aude et moi en avons dessiné les contours et proposé les ficelles, ont été brillament interprétées, modifiées par les acteurs. J'ai bien aimé mon rôle dans l'histoire: leur montrer que, comme moi et mon costume de metteur en scène, ils pouvaient revêtir celui d'acteur. Il n'y a pas d'essence figée, il suffit juste parfois d'y croire un peu et les frontières sont minces. Je ne pense pas qu'Amélie croyait pouvoir pleurer devant des centaines de personnes au début de l'année!

Ce qui se passe en coulisse est généralement inoubliable. Avant la BDA night, j'ai connu un stresse qui, et je le pensais vraiment, était sur le point de me tuer. Tout allait dans tous les sens, tout le monde était nerveux. Je n'avais qu'une envie: leur dire de se taire, leur dire de se faire plaisir. Mais est-ce que je prenais du plaisir moi? Je ne sais pas: surement. Je stressais. S'ils savaient que cela faisait trois nuits que je ne dormais plus. Stresser parfois, ça fait du bien. Heureusement qu'on a pris cette photo, qui m'a fait exploser tout le stresse, pour qu'un superbe spectacle se déroule sous les yeux surpris du campus. En coulisse, au Minicrit, j'étais plus serein alors qu'Aude était livide. Chacun son tour: on ne contrôle pas le stresse. Tout le monde courait partout, je me souviens avoir vu Agathe pleurer, Arthur lire son livre d'économie pour ne pas y penser, Axel et Edouard tourner en rond comme des fauves, Amélie un peu verdâtre et muette, Shanna et Guillaume plutot calmes et maitrisés, Youri un peu en vrille, Quentin fidèle à son stoïcisme, Camille s'occupant comme d'habitude, pour ne pas y penser, maquillant tous les mecs en travelos, Emilie et Clarisse, plutôt impassibles: chacun gère le stress comme il peut. "On fait passer l'electricité?" " On fait un calin?" On l'a fait Aude, on l'a fait: une troupe qui rit ensemble, qui se fait passer le courant! Le courant passe. C'est ce qui compte: gagner n'est pas important (parce que de toute façon, on était les meilleurs). Ce qui compte c'est la troupe, c'est le groupe.

"-Non, mais c'est débile de pleurer, j'ai l'impression de me forcer, mais d'un côté ça me touche ces conneries
-Paul, c'est un gala, c'est normal d'être touché parce que tu reçois un cadeau pour autant d'efforts et parce qu'on s'en va
-Non mais j'arrêt pas de me dire que je surjoue la tristesse, toujours cette impression de jouer et de ne pas être sincère, d'être convenu
-Pourquoi tu ne te fais pas confiance comme ça? Pourquoi tu crois pas en ce que tu sens?
-Je sais pas. Pas étonnant alors que je doute de l'amour des autres. Si je me fais pas confiance, comment tu veux que je fasse confiance aux autres, ou te faire confiance?

Impressions éparses. Maintenant, Clarisse et Emilie reprennent l'atelier. Quentin et Shanna sont restés, preuve des bons souvenirs. J'espère que tout se passera bien. Je leur fais confiance, entièrement, parce qu'il y a toujours une évolution vers le haut. Et là c'est génial: cela veut dire que ce qu'elles feront sera encore mieux! Mais il ne faut pas mettre la pression: je vous souhaite de vous exprimer d'abord, de faire ce que vous aimez et que les autres l'aiment aussi. C'est 90% de la satisfaction.Les 10% qui restent, c'est pour la victoire. Enfin bon, j'en doute un peu: parce que c'est quand même bien aussi de rentrer à pied tous ensemble en se disant que de toute façon, ils sont trop nuls, et qu'on aurait du gagner, enfin même, qu'on a gagné dans nos coeur. Voilà.

Je pense à vous.

"Oh roi Faragarafaramus, quand te désoriginaliseras-tu?"

jeudi 23 septembre 2010

Gainjins drunk in the subway

It's hard to tel I just remember the third time I drank this fucking beer the world began to turn around me without any gut to write something meaningful at that moment...I'm talking with my laptop right now half drunk because I can't really stand the fact that I'm losing control losing grip because I know he doesn't like that huh doesn't like that, doesn't like that, doesn't like that, doesn't like that, doesn't like that, doesn't like that

"Buble, buble, bitch, bitch"

Jordan n'aime pas que je dise que les gens boivent parce qu'ils sont malheureux C'est peut être vrai les gens parfois boivent comme ça sans être malheureux sans essayer de combler la naturelle dépression humaine mais en fait j'ai bien l'impression que les gens sont malheureux quand ils boivent, mais c'est parce qu'en fait je fais trop une analogie sur moi même parce que quand je bois c'est pour être bien avec les autres pour ne pas être encore trop décallé pour ne pas me sentir trop mal à l'aise... mais ensuite je suis heureux parce que justement, je peux faire "Kampaiiiiiiiiiiii" pour la sixième fois de la soirée sans me sentir stupide" mais c'est pas forcément logique parce que finalement je me mets à penser à des choses qui me font mal enfin en même temps on aime bien avoir des choses qui nous font mal pour nous sentir vivant enfin bon "Kampaiiiiiiiii" oui j'avoue c'est déjà la septième fois qu'on trinque entre les garçons de musashi koganei et que finalement on aligne plus deux paroles cohérentes

les gens ne parlent plus anglais quand ils sont saouls ils parlent japonais pour se délier la langue ou une autre langue sans construction aucune Je faisais encore griller de la viande de le Yakiniku pendant que mon verre de bière se remplissait comme par magie mais bon quand même être saoul pour la troisième fois de la semaine c'était pas vraiment raisonnable surtout que je n'aime pas être saoul j'aime bien avoir le contrôle et puis je trouve ça un peu illusoire mais je vais me faire engueuler et traiter de rabat joie encore une fois donc je bois parce que c'est une bonne soirée quand même

Puis on va dans le métro et deux jeunes gens plutot discrets et timides en général s'arrêtent à la mauvaise station juste pour se disputer et aller pisser et là je me dis putain! c'est ça le Japon comme s'il fallait être saoul pour comprendre ces gens que l'on embête dans le métro comme pour avoir envie de toucher son dos brûlant comme pour avoir envie de vagabonder dans les rues trop grandes しらない!しらない!
Peut être que c'est comme ça que ça commence l'éclat de lumière peut être que personne ne peut me lire maintenant mais pourtant j'aimerais bien que vous me lisiez ou peut être Jordan Youri Caroline Edouard qui m'ont accueuilli desespéré hier sans une question dans la grande ville japonaise qui m'engloutit sans que j'en sente laisé

"va-t'il se rappeler qu'il doit me conduire là où il a aimé?" Tokyo saoul n'a pas la même valeur comme l'Irlandais qui parle 10 langues dont le français (il est sauvé) enfin il n'était pas très net enfin moi non plus mais bon tout n'est qu'artifice littéraire après tout

en attendant que j'écrive un poème sur ce soleil glacé qui m'éclaire le visage et me laisse perplexe.

FIN (enfin, dodo, maintenant, tout de suite, bonne nuit)

dimanche 19 septembre 2010

"Le Japon, ça tripe"

"Kampai!" Yuko Arai, ancienne professeur de japonais, un énorme verre de bière à la main, entourée de ces anciens élèves, est entrain de trinquer en l'honneur de leurs retrouvailles au Japon. Nous sommes dans un restaurant japonais, à Shinjuku, après avoir traversé de longues allées bordées de gratte-ciels ressemblant à des bonbons lumineux géants. Des sushis et des giozas apparaissent et disparaissent à une cadence infernale. Les verres de bierre se remplissent tout seul par magie...enfin, non c'est plutôt mon impression. Je ne suis pas quelqu'un qui boit beaucoup en général. Du coup, je suis saoul au bout de deux bières et j'entre en communication profonde avec la nature. Pourquoi boire d'ailleurs? Peut être parce que dans ma future vie de président du monde, il serait ridicule de tomber raide devant l'ambassadeur du Japon ou de quelque chose comme ça. Enfin, notre entrevue avec Arai sensei ouvre bien des chemins. On baragouine japonais, sans faire trop attention aux fautes pour une fois. Tout le monde se comprend, et finalement peu importe le sujet: "l'important, c'est que tout le monde s'amuse".

Cela fait maintenant quatre jours que j'ai débarqué dans ce pays de fous. Enfin, je n'ai pas vraiment eu de contact profond avec la population, alors c'est plutôt dur de les traiter de fous. Mais une chose est sûre: "Le Japon, ça tripe" (dixit Youri). Enfin, pour commencer, tu réalises ce qui tripe le plus mal (à sec avec du gravier siouplait!). Les prix pour commencer: qu'il est agréable de payer huit euros par jour pour aller et partir de chez soi! L'argent coule vite, et bien trop vite. Tokyo est la ville la plus chère du monde. Même si manger n'est pas si onéreux, il devient vite cauchemardesque d'habiter loin du centre. Dans les transports en commun, surdéveloppés proportionnellement  à la dimension de la ville, on peut y voir des âmes dormir, épuisées par des trajets bien trop longs, ou encore livides, éclairés par la faible lueur des téléphones portables qui sont omniprésents dans tout le wagon. Je pense que je peux devenir japonais. Le métro est tellement calme que j'ai trouvé la confiance de m'endormir dedans. Devenir une petite fourmie travailleuse du voyage. Oui, "le Japon, ça tripe", dans le sens: "ça voyage". Bouger et bouger: les grandes rues de Tokyo ne m'ont pas encore séduites mais j'ai bien repéré les quelques ficelles de la vie étudiante tokyoite, de la vie tokyoite. De mes quelques ballades, j'ai été souvent surpris. Les Japonais, que l'on se représente coincés et sérieux avec le mot "honneur" dans le fond de la gorge, sont loin de corroborer le cliché. Les photos que je mettrai un peu plus tard seront là pour vous donner un aperçu.

La troisième année, "ça tripe"! C'est à la fois changer et développer ce que l'on est. Une continuité dans un décors différent, pour avoir la force de penser un autre chemin.

Arai Sensei est une très belle femme. Une japonaise dans le type "kawai", mais aussi dans le type "sympa et ouvert". "Intelligenteし, droleし, jolie femmeし," .Pourquoi ne trouve-t'elle pas un mari?! どおおおおして! Edouard et Jordan ont passé la soirée à essayer de la caser avec la clientèle du restaurant. Parfois, il est difficile de cerner les japonaises. Leur manière de s'exclamer, d'approuver ou de ne pas être d'accord rentrent en conflit avec nos habitudes. Soûlé par les deux bières, je demandais des conseils à Arai Sensei pour survivre dans ce milieux hostile qu'est Tokyo: on sent alors la proximité, on sent quand même qu'elle sera là pour nous aider en cas de besoin. C'était une bonne soirée, une de plus. Et nous avons une nouvelle alliée à Tokyo.

Arai sensei est lumineuse, éclaboussante, japonaise. Comme dirait Philippe Djian, elle me fait penser à "une fleure étrange munie d'antennes translucides et d'un coeur en skaï mauve". Cette citation, en plus d'être une belle phrase, continue ainsi "je connaissais pas beaucoup de filles qui pouvait porter une telle minijupe avec autant d'insouciance". C'est un peu l'image que donnent les femmes japonaises en ce moment. L'été est encore là, les jambes blanches sont au soleil, appareillées de minijupes et de minishorts à faire pâlir un Saint. Moi je dirais: parfois les japonaises, c'est pas seulement かわい, mais c'est aussiラ-ラ (ras-la). Il y a aussi un mythe autour de l'apparence des femmes japonaises et celui ci n'est pas faux. Les codes vestimentaires n'étant pas les mêmes, les femmes ne portent pas les vêtements occidentaux de la même façon. Et elles passent et repassent, sans fin, comme des petites fourmies insouciantes et provoquantes: un pays coincé? Ooh non, "Le Japon, ça tripe!"

"Kampai!" Au bout du quatrième "kampai", Masuda san tombe à la renverse dans un rire des plus distingués, avec quatre grammes dans le sang. Pendant ce temps, je tangue encore une fois, encore une bonne soirée (qui se finit un peu mal). Pendant ce temps, on rit, on essaie de parler japonais, on nous associe à des figures mythologiques (encore une fois, on m'a dit que je ressemblais à Harry Potter), on nous vole de l'argent dans notre portefeuille, on nous prend en photo avec des signes de victoires." ビ-ル、ビ-ル、ビ-ル!" Encore une soirée étrange, comme celle avec le luxe d'être sur un toit à Tokyo, de parler de Sciences po, de cul, de nos vies, des débuts difficiles, encore de cul (oui parce qu'après tout on a 20 ans!), des gossips... Des soirées puis des journées dans des parcs. "Le Japon, ça tripe mec, ça tripe!"

"Gros sexe le Japon". Oui, le Japon a-t'il un manche de bucheron? Je ne sais pas. Ce que je sais c'est qu'il est toujours difficile d'arriver quelque part, de se construire de nouveau. Quand je bois, ou quand il y a des gens, je suis silencieux. Peut être qu'ils ne me trouvent pas drôle ou timide: chacun sa manière d'apprécier les effets des deux bières, en regardant les visages s'activer et rire. Il faut s'adapter, c'est toujours le plus dur, se faire violence, aller vers les autres. Mon dortoir me donne envie de le faire: un couvre feu dans un dortoir rempli de mâles étudiants. Nomikai demo shiranai! J'ai encore un peu de mal, mais je trouve petit à petit les traces dans lesquelles il faut marcher. Mais ça avance, ça avance. Il faut bien!

Tokyo. Marcher droit, comme si de rien n'était. Alors je l'ai retenu en passant légèrement ma main dans le dos de manière suffisamment pesante pour lui faire comprendre que j'étais là. Tokyo. Discrètement je lui passe l'Inde dans sa main. Qu'est-ce que Bharat par rapport à Tokyo. Tout et rien , "Homme des mers". Tokyo et ses yeux brillants, indécis mais pas insensibles. Voler un baiser à Tokyo? Quel challenge! En a-t'elle envie? Bien sur! Enfin, peut être. Hésitante Tokyo, qui ne se laisse pas embrasser comme ça. Elle a un prix? Peut-être! Le vaut-elle? Sûrement! Enfin, nous sommes tous égaux face au ciel. Même Tokyo. Sous le grand ciel sans étoile et tout le temps éclairé par ce grand champion de l'écologie. Un ciel plein de possible, tout de même limité par le prix des billets de train, où on peut tout prendre par les bras pour les amener en voyage! Oui, Youri, tu as raison: le Japon, ça tripe!

vendredi 17 septembre 2010

Dans la cité perdue (2)

"Dans la cité perdue, je me suis retrouvé
Dans une salle sombre, sans autre présence
Que le grand homme blond, silencieux, éveillé
Tournant sans bien comprendre d'où provient sa souffrance."


En fait, j'avais toujours pensé être seul dans le noir. Qu'il n'y avait personne d'autre que moi, qu'on m'y avait laissé, seul et sans aucun espoir. Qu'il n'y avait pas la couleur que j'étais le seul à penser voir.

Nous ne sommes jamais seul dans le noir. Dans la cité perdue, les âmes égarées subsistent au changement.

J'étais assis, sonné, dans l'obscurité, en face du jeune homme blond qui se frottait la tête. La collision nous avait rendu sourds, nous avait désorientés. Comme s'il fallait ensemble retrouver le sens de l'orientation, creuser de nouveau un chemin, repartir au bout de la nuit. Le jeune homme blond, l'homme des mers, avait l'air sérieusement amoché, l'oeil tremblant, silencieux...

Mais il avait toujours ce sourire.

lundi 13 septembre 2010

Sous la pluie

Les lances du soleil se figent dans le sol humide et percent les ombres qui s’enfuient, nues et vides. La pluie tombe; cette odeur que parfois l’herbe laisse monter, chaude et vague.
Les mains des enfants sont toujours aussi sales, sous la pluie, les doigts crottés de terre et de feuilles. Alors, on entend traverser des comptines d’enfants, dans les Jardins fleuris par les larmes de la lumière.
Sur l’herbe menue verte, l’onde qui monte et qui descend, murmure à nos oreilles:
- “Mineur crépitement de farandoles majeures.”
C’est un homme, pendu à l’arbre qui l’a dit: « cette estampe est pignochée de lumière ». L’homme est à l’arbre, ses mots sont masqués par le bruit de la pluie qui s’enfuit. Ses pieds pendent du sol.
Derrière lui une pierre, une roche stellaire. Une grosse roche s’affaissant, lisse, couverte de l’eau de l’ennui. Les comptines joyeuses s’y perdent, se taisent. Elles s’étouffent dans la forêt des bois de lait, dans le marasme des choses.
Le sang tache le gazon noir. Et les enfants courent dans les ruelles végétales, suivent les traces de sang comme les petits cailloux du labyrinthe. Pour creuser des trous; et la roche, l’épitaphe, le tombeau sylvestre, à la lueur de la lune. Le Néant qui coule sur la pierre lisse des âges, les enfants se retrouvent dans la forêt où il n’y a rien à faire; rien; il y a juste l’Homme.
L’Homme a creusé des trous, le visage plein de sang. Et, la tête penchée sur l’écorce, il repense à l’eau sur son visage, à nous; visage, terre et poussière face à l’étreinte de l’Univers.

La corde de l’ennui, pendue à son cou, l’a pendu à l’arbre.

“Un roi sans divertissement est un homme plein de misère.”

Daydream believer

C’était un moment déterminant

Et il faisait quand même noir

Le rêveur et la reine casanière vivent une histoire d’amour qui n’existe pas

C’est encore la création du rêveur

Lui qui voit tout fleurir, sur la colline ; elle qui a son visage brouillé

* * *

C’était un moment déterminant

En pleine journée sur la colline, elle était assise sur l’herbe fraiche ; le vent amenait des pétales de fleurs dans ses cheveux noirs.

J’aurais pu l’approcher ; nous nous serions aimés encore une fois sans vide.

Daydream believer , cette musique… Les accords et les amants se rapprochent , il n’y a pas de noirceur. 

Daydream believer. Toi, toujours : celle que je peux atteindre, recherchée dans les larmes et dans l’enfance, la presque-toujours- absente.

La lumière va s’éteindre sur toi, les yeux rivés sur le cœur qui se sert.

A daydream believer and an home coming queen.
 
(écrit en 2008)

漢字を食べましょう

Elise et Arai sensei

C'est le chef Francesconi qui vous parle!

Mon Dieu! Une journée de plus à ne pas faire de kanjis. Et la rentrée approche! Ah, mais, vous, bande de paiens et petits gourmands, est-ce que vous comprenez cette angoisse des kanjis? Est-ce que vous avez déjà...mangé des kanjis?

Le kanji est un plat de gourmet mais qui, à forte dose provoque une véritable indigestion. Il n'y a guère que les Japonais qui peuvent supporter ça!

Un "kanji", c'est la traduction japonaise de "caractère chinois".( association de 漢, kan, chinois.   字, ji, caractère) .C'est aussi, par la même occasion, le cauchemard de beaucoup de japonisants. Brièvement (quart d'heure culturel, tadaaam): l'écriture japonaise est complexe. Elle se compose de deux sillabaires et d'un ensemble de caractère chinois. Les hiraganas, ensemble de syllabes japonaises, permettent d'écrire tous les mots d'origine japonaise, mais sont surtout employés pour la conjugaison des verbes, des adjectifs et des particules grammaticales. Les katakanas servent à retranscrir les mots étrangers. Les caractères chinois eux, permettent comme les hiraganas de retranscrire les noms, verbes, adjectifs et autres avec des idéogrammes. Ils sont alors préférés aux hiraganas. L'écriture de la langue japonaise est originaire de l'écriture du chinois. Les hiraganas et les caractères chinois sont utilisés ensemble pour faire des phrases. Bon, passée cette explication approximative, vous aurez bien compris que pour écrire et lire le Japonais, il faut faire comme en Chinois, c'est à dire se taper des lignes et des lignes de caractères à apprendre, pour les oublier très vite.

On arrive très rapidement à avoir une relation de haine avec les caractères chinois, surtout au début.  D'abord, il faut connaître la clé qui ouvre le caractère et qui lui donne un point commun avec tous les autres. "Alors est-ce que c'est la clé de l'Homme ou de l'eau ou du poisson...ah non c'est vrai que ça ressemble à celui de la pierre qui roule dans un petit matin de printemps - -"). Une fois le caractère retrouvé, il vous faut apprendre sa signification  (alors en honyomi c'est "shi" (comme 50 autres caractères) et "tabe" en kunyomi, mais d'après le Kanji to kana, ça dépend de l'agencement des étoiles...ouh dur!) Enfin, pour écrire un caractère, sachez qu'il est bien mieux de suivre un ordre de tracé des traits! Parce qu'en plus d'être exigeante, l'écriture des caractères est aussi un art quasi divin (manquait plus que ça!) Vous vous retrouvez alors comme un débile à votre bureau à compter à chaque fois que vous apprenez un caractère. "Alors pour écrire l'eau, c'est UN très comme ça, en DEUX c'est comme ça..." . Ainsi, vous en apprenez 10 ainsi pendant une bonne heure et une heureuse surprise vous attend! Vous vous rendez compte qu'une fois le dernier tracé..."Mince, c'était quoi le premier déjà?"  Eh oui, faire du japonais, c'est bien reproduire le mythe de Sisyphe (シジウフだよ)

Mais des kanjis, il y en a partout et tout le temps! Il faut donc les apprendre en masse. Ce qui est bien c'est qu'au bout d'un moment, la main prend le pli et les enregistre beaucoup plus facilement. Cependant, les gentils professeurs ne nous disent pas que leur difficulté va s'accroissant. Miam miam le kanji de 儀: 14 traits pour dire " règle". Miam miam le kanji de 歳 (sai, ou "l'age") et ses 13 traits!

Vous vous régalez n'est-ce pas? Les kanjis sont, en tout cas au campus du Havre, la preuve même de la volonté qu'ont les élèves à ne pas être studieux. "Trop c'est trop", "C'est trop infâme",  "Je craaaaaaque (euh, Lina, descends de la table s'il te plait): oui car les élèves, en plus d'apprendre des caractères, avalent du japonais à la pelle (et encore il paraît que ça va doucement, ils sont mignons) et parfois ils deviennent fous.

Evidemment, personne n'a le même rapport avec les kanjis:
-il y a d'abord les profs de japonais: "Oooh, mais c'est fashiru (はは・むすかしくないよ...tu parles!). C'est comme ça, comme ça et encore comme ça, puis comme ça >>>戦 (tadaam!). Hi, hi, hi"

-Vous avez ensuite les faux blasés: "Non, mais j'ai trop rien appris!"..."Euh, mais t'as eu 20 sur 20 là?"..."Ouais mais quand même!"

-Vous avez les malins: "Eh ben, Youri-san, pourquoi t'écris les caractères au tableau avant le test, t'es pas prêt?" "-Non, non, c'est juste pour qu'ils soient devant nous pendant l'interro, pour blouser la prof!"

-Vous avez les élèves normaux: "Euh Katchenin, pourquoi tu suis pas le cours d'International relations in Asia?" -J'ai pas travaillé mes kanjis!" "-Mais c'est dans 30 minutes!" Eh oui, les kanjis, ça s'apprend très bien sur les genoux, pendant des cours très chiants. Un peu comme les mots croisés ou le sudoku.

-Vous avez aussi les geeks des caractères:
"-Paaauul, je sais écrire "distributeur automatique" en japonais, et il y a cinq caractères!"
-Mais on devait pas l'apprendre?
-Non, mais j'avais envie!

Ou bien encore:"Paaauuul, dans mes bras! Il est trop beau ce kanji! (petit silence géné)" "-Hum magnifique! Mais ça fait combien de temps que tu fais des kanjis?" -Près de trois heures, et après je fais du Coréen! -Mais il est deux heures du matin?! (enfin, vous me direz, y'en a qui joue à WOW, d'autres non!)


-Vous avez aussi les désépérés: "Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa, je les retiens pas!" Et là, le geek des caractères de répondre "Mais si, c'est facile! C'est le poisson, sur la clé de l'eau avec le feu et la femme qui fait cuire du riz en dessous. Regarde (caractère dessiné en 3 secondes)"
-Mouais, j'aurais du apprendre le Vietnamien! Au moins, la colonisation leur aura fait oublier les caractères chinois!"

Vous l'aurez compris, on ne peut pas rester de marbre quand à la supériorité sémiologique des caractères chinois! Mais bon, parfois je suis un peu sceptique quand il me faut une heure qui m'apprendra à écrire les caractères qui me permettront de lire le nom d'UNE station de métro. Qui ne tente rien est un fou!

Le Japon et ses kanjis (et ses japonais!), c'est J-2. 所懸命頑張ってくださいね. "Mais ça veut dire quoiiiiiiiiiii?" "-T'occupes! Mange tes kanjis!"

dimanche 12 septembre 2010

"Dans la cité perdue"

http://www.deezer.com/fr/music/home#music/result/all/saez%20en%20travers%20les%20n%c3%a9ons

Dans la cité perdue, j'étais à la Table des Rêves. Elle sentait l'alcool renversé. La pièce était remplie d'une fumée bleue, s'élevant de nulle part. Des femmes en mini-jupes marchaient à quatre pattes sur les murs, avec des lunettes roses et mauves, comme perdues. Il n'y avait pas grand monde sur le sol. La maison était un labyrinthe, habité par les fantômes. Les enceintes crachaient une musique lente et mélodieuse.
"Tu ressembles à ce rêve que j'ai fait autrefois
Que j'ai fait tant de fois, que j'ai fait avec toi
Dis on le refera? Dis? On le refera?
Allez! dis le, qu'on le refera..."

Elle dansait, exaltant toutes les formes de son corps, comme une folle. Les circonvolutions de sa poitrine mimaient avidement la courbe de ses fesses. Boum. Le corps à la musique. Boum. Le regard lubrique. Boum. C'était aussi celle avec qui on ferait l'amour sans raison, le refaire encore comme pour faire un rêve. Quand elle dansait, elle ignorait le vide, et vidait mon ventre de chaleur. J'avais l'esprit embrumé ce soir là.

"Tu ignores le vide devant toi!
Les vertiges et la peur, tu connais pas.
Tu ignores le vide devant toi!
Les vertiges et la mort, tu connais pas."

La maison était un labyrinthe vert fluo et noir. Les portes claquaient,  laissant sortir tantôt les amants, tantôt les fous. Entre deux couloirs, à un carrefour, il y avait un miroir incrusté de rubis et d'émeraudes. J'y ai plongé mes yeux pour y voir le fond des mes iris. Et je l'ai vu derrière moi.

"Tu ressembles au naufrage que j'ai fait autrefois
Que j'ai fait trop de fois, que j'ai fait avec toi
Dis on le refera? Dis? On le refera?
Allez jure, allez crache! Qu'on le refera!"

C'était un homme grand et blond, de dos, et il marchait dans un couloir très sombre. La musique continuant, le rêve dans les joues, j'ai alors décidé de le suivre, comme pour voir son vrai visage. Sa démarche était lente, tranquille: elle ne montrait rien. Il continuait à marcher dans ce couloir sans lumière, s'enfonçant peu à peu dans l'ombre.

Je l'ai suivi en évitant les fous qui venaient du couloir. Surgissant de l'obscurité, comme des autos en perdition, comme des feux d'artifice, ils slalomaient entre moi et l'homme blond. J'ai pris peur au départ, mais j'ai continué la marche, fasciné par l'éclaireur qui avançait sans frémir, comme s'il voyait dans le noir.

-Le sommeil naît dans l'obscurité et fait naître les rêves-. Il faisait noir tout autour et le silence gagnait l'espace. Mes yeux s'habituaient à l'absence de lumière et je vis alors une petite pièce d'où on ne pouvait sortir. Un peu comme dans un rêve.

L'homme blond se retourna. Je vis son beau visage triste, taillé comme celui d'un mannequin. L'obscurité creusait ses traits. Il ne prononçait pas un mot. Au loin, on entendait encore quelques bribes de la fête.

L'homme marchait encore, tournant en rond dans la chambre. Au début, je pensais qu'il savait où il allait. Mais je me suis rendu vite compte qu'il marchait au hasard, avec une démarche hésitante. J'ai essayé de l'appeler pour le guider puisqu'il était perdu. En vain. L'homme, inévitablement, m'a heurté de plein fouet.

Car il ne voyait pas dans le noir.


"Dans la cité perdue, au travers de la nuit
Toi tu vois bien, toi tu vois bien
En travers, la douleur et la mélancolie
Tout ira bien, tout ira bien."





(les passages entre guillements sont extraits de la chanson "En travers les néons" de Damien Saez)

samedi 11 septembre 2010

Bharat, Bharat


From Parveen's car


(…)

En Inde, c'est une certitude, il fait froid! Enfin, c'est ce que je me dis, à l'avant de notre voiture de tourisme. Parveen Kumar, notre chauffeur, pour nous faire plaisir, a mis la climatisation sur puissance quatre, et malgré les 40° de dehors, nous frôlons, mes parents et moi une hypothermie certaine. Il y a quelque chose d'ironique à vivre dans autant de fraîcheur, en prenant la route d'un pays aussi chaud et gigantesque. C'est un peu comme si c'était une protection, un cocon contre le pouvoir de la gigantesque Bharat.

(…)



L'Inde, à première vue, c'est le bordel, même derrière les vitres du carrosse climatisée. A notre arrivée, à 6 heures du matin à Delhi, le soleil s'est levé au milieu des rues sans goudron ni trottoirs. Ses rayons traversent les toiles de fils électriques, des centaines de fils anarchiquement reliés, donnant l'impression d'être pris dans une toile d'araignée. Après avoir déposé les affaires à l'hôtel, nous nous sommes risqués dans les rues, et dans la quatrième dimension. A Karol Bagh, pourtant quartier plus aisé que Old Delhi, une masse grouillante de gens, pas de sens de circulation de la route, des klaxons partout, des gens qui veulent vendre tout et n'importe quoi, du bruit, des crachats, des vaches, des enfants, encore un peu de bruit, une pauvreté hurlante et ulcérante, des travaux (ça s'est sur, c'est mal barré avant les jeux du Commonwealth), de la musique hindou, une statue de Hanuman géante, du bruit, encore du bruit, que du bruit! Black out! Retour paniqué à l'hôtel, et sieste carabinée dans la chambre climatisée...  « Ne me demandez plus jamais de sortir! » que je me suis dit.
Une Vache au dessus des Hommes

(...)

L'Inde demande une acclimatation certaine, qui réclame une flexibilité d'adaptation. Le cerveau est sans cesse stimulé par des choses qui ne nous arrivent jamais. Au début, on ressent un véritable sentiment d'agression. Il n'est pas rare qu'au moment de rentrer dans le taxi, des femmes accompagnées de leur bébés en pleurs vous demandent de l'argent. Cet horrible geste: la main touche la bouche avant de se positionner pour mendier, comme pour mimer sa faim, reste gravé dans ma mémoire comme une chorégraphie macabre. Nous étions enfermés dans la voiture en attendant le chauffeur, pendant qu'elles tapaient avec leurs bagues contre les vitres, nous montrant leurs enfants crier. Elles étaient cinq, toutes avec un bébé dans les bras. Le bruit de la climatisation masquaient un peu leur litanie mendiante, et l'inévitable culpabilité du nantis de l'Occident.

Plus de route à Pushkar en temps de mousson




(…)

Enjoy!

Sortir de la climatisation, c'est possible. Mais il faut accepter d'avoir chaud et de voir l'Inde, implacablement plurielle. Nous avons visité le Rajastan et la Vallée du Gange (Uttar Pradesh), ce qui constitue en soi, deux mondes différents, bien que tous les deux dans le Nord de l'Inde. Nous sommes passés par Jaipur, Pushkar, Agra, Vanarasi, Haridwar et Rishikesh avant de retourner à New Delhi, notre point de départ. Alternance entre grandes villes dévorantes et fatigantes et petites villes qui ont inspiré les hippies du monde entier: entre les deux mon cœur balance. Grande ville, petit village: tradition et modernité? Ce poncif est pourtant bien réel en Inde, bien que moins duel et tranché. Je ne crois pas que les deux constituent un vrai couple de contraire. Ici, la tradition s'est véritablement introduite dans la modernité: il y a une réalité indienne plus qu'une identité qui se bat pour retrouver ses racines traditionnelles. Ce conflit semble exister, certes. Mais, il n'y a pas à penser à un paradis perdu quand on voit deux Sikhs en train de boire un Coca cola au coin d'une rue. L'Inde, c'est un peu comme un « Jack-in-the-box ». Les surprises sont à chaque coin de rue, bonnes ou mauvaises. Le plus impressionnant est peut être le fait religieux, omniprésent, puissant, coloré, incompréhensible et bruyant. L'Inde est un monde: régime politique bien trempé, administration omniprésente malgré l'apparent désordre, culture et cinéma propre, des dizaines de langages différents, une nourriture particulière, ses propres faits religieux et ses propres lieux saints, une Histoire interminable, son industrie et ses monopoles... On se sent alors tout petit, dans sa voiture de touriste.

Une boutique de Karol Bagh

(…)

« Chère Amélie, cher Dylan... Je vous remercie de m'avoir accueilli à Delhi pendant ces vacances. J'ai été très heureux de vous revoir et vous souhaite tout le bonheur du monde. J'espère que vous allez bien et que vous vous faites aux moeurs indigènes. Je vous envie! Profitez en bien! » Ce qui est drôle, c'est le plaisir que l'on a à retrouver du connu lorsqu'on est dans le flou total. Passer des heures dans un restaurant tamoul à parler d'une réalité lointaine, à gossiper, à se raconter nos vies, nos déboirs et les nos réussites. Pas de doutes: une expérience, un amour n'est bon que si il est partagé avec d'autres. J'aime partagé ma vie au milieu d'un thali!




(…)

Comment aimer un film sans le comprendre?


« Je voudrais qu'il voit ce que je vois ». Vanarasi est une grand ville sainte. Cependant, j'ai réussi à trouver des petites rues, des petits dédales remplis de boutiques et de restaurants minuscules. Un labyrinthe vivant, avec foule et rires, pourtant très calme. Il s'est alors mis à pleuvoir. Et pas une petite pluie: la mousson, ou chaque goutte est un seau d'eau qui fait déborder les rues. Un marchant, pour une fois non envieux de me faire acheter une quelconque bricole, m'a alors proposé de m'assoir à sa boutique en attendant que la pluie cesse. Sans un bruit, nous avons attendu la fin de la pluie. Je me suis alors dit qu'il fallait que je les y emmène, qu'on voit nos amis communs aux quatre coins de l'Inde. Il fallait que les gens que j'aime voient ça, qu'ils voient ce que j'ai vu. Certains partent en voyage pour se couper de leur vie, pour oublier, ou tenter d'oublier ce qu'il y a derrière, fuir les problèmes. Moi j'aime voyager pour m'appauvrir, tout remettre en question, et pour trouver des endroits que les autres aimeront, pour les aimer davantage par la suite.

(...)
Je ne me baignerai jamais dans le Gange. Mais au loin, elle est sortie des eaux, de dos, ruisselante. Étrange impression de chavirer, bien qu'on se remette vite sur le droit chemin du voyage.



"Dans son sari na plin zimages"

(…)

Fatigue

L'Inde l'avait désemparé...


Fatigue. L'Inde pendant trois semaines, ça fatigue, et quand on est touriste, on est seul. Et comment donc ne pas y penser?


...mais elle continuait à regarder vers l'avenir
(...)


"Sous la pluie, nous ne voyions
Que l'air orangé et rouge
Et les bâtisses d'un rêve ancien
Bordées de lumières vertes et roses."

Bien sûr il m'est arrivé d'y penser. Comment ne pas y penser, quand on est assis sur les ghats de Pushkar, merveilleuse petite ville du Rajastan, ville de hippies. J'ai toujours eu une propension à la rêverie. J'aime penser à l'amour, parce qu'il me fait vivre. Certains n'y pensent pas, ou ont peur d'y penser. Moi j'y pense trop. Et comment ne pas être une machine à aimer, quand on voit une ville pareille. Ville orangée quand il pleut, ville blanche. On pourrait y rester des heures et ne pas revenir. Ce qu'on peut retenir de l'Inde, c'est cette fascination qui peut nous prendre, n'importe où et cette diversité qui explose nos codes et nos valeurs. Si l'Europe aime l'Unité, l'Un, en Inde se décline sans cesse le contingent et le multiple, dans un harmonieux chaos. Alors, Parveen nous demande de remonter en voiture, pour la prochaine destination. Et on retourne sur les routes de Bharat, avec de la musique indienne plein les oreilles et plein les yeux. Jai ho, my friend, Jay ho!

vendredi 10 septembre 2010

"Paris c'est la ville de l'amour"


A cause de quelques problèmes administratifs, me voilà dans l'obligation de passer une semaine à Paris pour obtenir mon Visa étudiant avant d'aller au Japon. Une semaine à Paris, une semaine dans un sas, entre deux vies, . Et pourtant...

En ce moment, il ne fait ni chaud, ni froid, mais le soleil est glacial. Les rues sont éclairées faiblement mais bien visibles tout de même. Je n'avais jamais remarqué que Paris était aussi belle. C'est comme un musée géant, des grandes statues, des bâtiments écrasants de prestige, une accumulation de lieux cultes, un fleuve gigantesque, des êtres humains partout qui viennent et sortent sans cesse des bouches de métro. Paris est une engloutisseuse, elle mange et dévore des vies, emprisonne des âmes et ensorcelle les passant. Une illusionniste. La ville de l'amour.

Un jour, une fille aux seins énormes m'a dit que Paris était une ville romantique, une ville pour les histoires d'amour. Pourquoi pas? Il est vrai qu'il y a beaucoup de gens beaux à Paris (comme partout vous me direz). Un espèce de conte de fée perpétuel, qui définit la mode et les codes de l'amour. Ville romantique: on aurait presque envie de s'y promener à cheval et de chanter des sérénades aux balcons. Mais je reste sceptique, avec la petite phrase de Flaubert bien en tête: « Ce qui reste sous le balcon après le passage d'un romantique, c'est le crottin de cheval ».
Mais Paris est bien la ville de l'Amour, car les amoureux y viennent pour s'embrasser.
Sous les faibles rayons du soleil, un jeune couple, beau et fringant, s'embrasse à perdre raison adosser à la barrière qui les séparent de la Seine, qui coule sans réfléchir. En passant dans les jardins, il y a des « amoureux qui s'bécottent sur les bancs publics », main dans la main, des étoiles plein les yeux. Ils passent amoureux le long de la Seine. Assis dans l'herbe, ils se prennent en photo, comme pour s'immortaliser, pour ne pas que leur amour s'envole, et pour se prouver que leurs baisers ont du sens.

C'est à ce moment là qu'une petite flamme est apparue dans ma main. Je n'ai pas eu peur, je l'ai regardé dans les yeux et j'ai continué ma promenade.
Et la flamme grandissait au fur et mesure que je déambulais dans Paris. Quartiers des Halles, puis Hôtel de Ville, Nôtre Dame, St Michel, les amoureux étaient toujours là autour, et la flamme grandissait. Le ciel s'assombrit. Les couples traînaient partout, comme des ombres. L'un offrait une pâtisserie à l'autre, comme pour montrer son amour autrement que par les mots, avant de le manger. D'autres s'embrassaient, tels des goulus, parce qu'au final, le corps parle plus que l'esprit. D'autres, partout, entrelacés comme pour éviter de se dire des mots qui n'expriment pas les complications de leurs esprits fatigués. L'amour se déclinait dans le noir, sombre et inaudible.
« L'amour est à réinventer, on le sait »

 Merci Rimbaud. Réinventer l'amour, ne pas tomber dans ses pièges, sa dépendance, aimer en le liant à la liberté, car les deux ne sont pas antinomiques. Aimer, ce n'est pas clair et distinct, ce n'est pas évident: l'évidence rassure mais leurre. L'Amour, comme la Liberté, est plein d'inconstances et de définitions, d'hésitation et d'incertitudes. Il se crée, s'invente à chaque fois. Et il brûle, gèle, va et revient.

« Parfois ton amour, ou cet astre que tu ne peux nommer, gelé, me brûle les mains ».


Traversant la rue, je voyais la petite flamme vaciller, comme si le Soleil, en pleine éclipse, ne pouvait le raviver. Et j'ai vu le tourbillon de mon amour autour de la flamme, accroupi pour la protéger. Il faut protéger ce qui est précieux des intempéries du dehors. Paris: on ne peut qu'en tomber amoureux et faire l'amour entre ses murs. Ce n'est pas la fille aux gros seins qui me l'a dit. C'est la petite flamme dans mes mains, vacillantes, aux milieux des pavés de l'engloutisseuse.

Et secoué, les cheveux en bataille, les lunettes de travers, toujours accroupi pour protéger la faible flamme, j'ai regardé, le nez en l'air, les rayons d'un grand Soleil glacé.

"Zot lamour parey in soley glasé"
Paris n'avait jamais été aussi belle.

mercredi 8 septembre 2010

"There is no place like home"

St Leu, Ile de La Réunion, France
Rentrer chez soi, c'est dur. Mais le plus difficile est peut être de repartir, encore. Après une année tumultueuse dans les contrées havraises, visité l'Europe et après avoir sillonné les îles françaises, il a bien fallu rentrer chez soi. Un an d'absence.
La Maison est toujours la même mais l'illusion s'échappe dès que j'entre dans ma chambre. Les arbres et les végétaux en ont pris possession, les tapis grouillent d'insectes, la penderie est pleine de bruits étranges, et un ruisseau s'est installé sous mon lit. Il n'y a aucun doute: aucun n'être humain n'est entré ici depuis bien longtemps. Je suis seul à l'intérieur, et redevient un enfant.

Comme je l'ai dit, il est dur de rentrer chez soi. A la Réunion, les gens marchent moins vite qu'en France, ils sont moins hargneux et moins pressés, mais aussi moins francs et plus mystérieux. Il faut ralentir sa démarche, et ses habitudes. La Réunion est moins tranchée que la France. Il y a finalement peu de blancs et de noirs: même si les disparités sociales existent, le métissage rend la population réunionnaise bigarrée et complexe, pleine de complexes aussi.

Il est aussi dur de rentrer car tout à coup, on se retrouve à la place « passager » de la voiture, à côté de sa mère qui vous emmène faire les courses, comme si finalement on avait pas 21 ans, mais qu'on était resté l'adolescent. Alors que tant de choses ont changé, et vont changer encore.

Revoir les amis, les connaissances. Quelque chose de difficile aussi. Quand on quitte sa vie de lycéen pour devenir un étudiant, on se retrouve beaucoup plus centré sur soi et sur son avenir. Faire les voyages qui vont nous épanouir, seul. Faire les études qui vont nous mener loin, seul.

Rencontrer des gens, tout en restant soi, rencontrer des gens qui sont « nous » et « autre » à la fois, seul encore. En revenant à la Réunion, j'ai alors rencontré des individus, avec leur petit bonhomme de chemin derrière eux, comme moi de retour au Pays natal. C'est d'ailleurs étrange car, bien que le temps a passé, on ressent cette proximité, de jeunes en devenir perdu sur l'île de l'enfance.
Le Spot de Surf de St Leu, mondialement reconnu

Cette Maison feuillue sentait l'adolescence et les excroissances de l'amour. Au loin on entendait encore bien le bougonnement perpétuel de la Mer, comme une présence rassurante qui aide à trouver le sommeil. Car la Maison est une « maison natale ». Non pas qu'on y naisse biologiquement, c'est simplement que cette maison a épousé une nouvelle naissance, une nouvelle existence. Nous avons plein de maisons natales. Mais moi, celle que je connais le mieux, c'est ma Maison dans les arbres.

« Être toujours autre part qu'ici ». Je pense qu'on cherche toujours l'endroit où l'on sera bien. C'est vrai qu'à notre âge, il faut voyager et fouiller partout à la recherche du mieux, il faut découvrir et tout voir. Mais n'est-ce pas aliénant que de chercher toujours le mieux? Car, bien que bouger puisse être salvateur, « il y a des fleurs partout pour qui veut bien les voir ». La Maison natale n'est pas le mieux, mais peut être bien. Cela m'a pris deux mois pour le comprendre.

Alors, si le malaise de l'arrivée est bien présent au départ, on ressent vite les pieds s'enraciner dans le sol. Dans ma chambre, je sens alors les gouttes d'eau tomber de mon plafond, comme si la pluie transperçait le toit. Mes pieds s'enfoncent et prennent racine dans le tapis mouillé, tandis que mes bras prennent vie et se parent de feuilles et d'épines. Les tiges et les bourgeons envahissent mes cheveux tandis que ma peau durcit et brunit. Le chant des oiseaux sauvages résonnent dans la chambre vide et sombre, végétale.

Alors on sort, on raconte des bêtises, on mange des pizzas sur la plage, on se promène sur le port, on regarde des filles en boite de nuit (se moquant intérieurement d'une donzelle qui devant nous et un miroir se caresse la poitrine en dansant), on danse sur Barbie girl après cinq verres d'un punch qui fait très mal à la tête, on rigole, on fait des accidents de voitures, on marche et démarche, on joue du piano pour faire chanter les lions et les singes, on caresse prudemment avec la langue la fumée bleue d'une cigarette un peu étrange, on console et se fait consoler, on voit ce qui n'est plus, et ce qui est encore . Les racines prennent de l'eau dans les ruisseaux du rêve.



Ainsi, il ne peut être que difficile de partir, comme si la vie nous avait plaqué de nouveau contre la joue mal rasée de l'oreiller. Le Japon approche, avec lui un lot de découverte, de joies certaines et de problèmes certains. Je ne pensais pas qu'il serait aussi difficile de les quitter, de repartir se perdre. « Voyager pour s'appauvrir », se dénuder encore, retourner en France, s'enfoncer dans lanuit avec curiosité, pour regarder dans le ciel les nuages et leurs éclairs, et garder au fond de soi cette petite chanson:

« Mon pays, bato fou, oussa banna y ral à nous? »
Devant chez moi

vendredi 3 septembre 2010

Mon ami n'aime pas la pluie

Mon ami n'aime pas la pluie
Alors, pour lui faire plaisir
J'ai courru dehors pour chercher
Une ombrelle ou un vêtement de pluie.

Sous la pluie, nous ne voyions
Que l'air orangé et rouge
Et les bâtisses d'un rêve ancien
Bordées de lumières vertes et roses.
Comme mon ami n'aime pas la pluie
Je suis resté seul sous mon arbre
Sentant les gouttes tomber des feuilles
Et la douce odeur de la pluie.
Soudainement je la voyais
Long corps, les pieds enracinés
Son visage d'arbre, écorce ambrée
Son sourire mouillé par l'eau vive.

Mais mon ami n'aime pas la pluie
Je revins avec une grande feuille
Que je lui glissai dans la main
Frolant doucement son doigt froid.

Au loin, la femme avait disparu
Dans l'air orange, sans aucun bruit

J'aurais pu la chercher

Mais je ne suis pas ressorti
Car mon ami n'aime pas la pluie.

jeudi 2 septembre 2010

Introduction

Varanassi, Uttar Pradesh, India
Je suis sur une petite barque, un peu frêle la barque, mais elle avance bien, dans cette immensité sans vague qu'on appelle la Mer.

La Mer. Oui, chers lecteurs, j'ai décidé de vous emmener sur la Mer, avec moi, dans ma petite barque. Bon, ma petite barque, elle est pas encore très bien conçue (parce qu'il me faut un peu de temps pour maîtriser l'outil blogspot surtout). J'espère qu'on ne va pas chavirer.

L'envie d'écrire et de le montrer aux autres vont quelque part un peu ensemble. J'ai eu envie de recommencer à naviguer, parce que les voyages commencent à présenter le bout de leur petit nez curieux, parce qu'on a toujours un peu de poésie plein la tête, parce que le monde est toujours à poétiser. Et pour partager ce que l'on voit parce que ça n'a pas vraiment de sens de voir le monde tout seul.

La barque craque sous les eaux qui s'agitent lentement.

Alors moussaillons, sortez les gilets de sauvetage! Sur le départ. Babord ou tribord, je sais plus trop. Enfin, ne craignez pas le mal de Mer! Ne craignez pas les vagues! En Mer, même s'il fait noir, même si ça bouge de partout, on s'en fout, on est jeune et on s'attache pas, aimer sans cesse et partir, revenir, plonger et recontrer les sirènes des fonds marins.  On vogue toujours à tanguer, sur le fil de la Mer. Et on chantera des chansons paillardes, tu verras, on fera du bruit! Tu me fais confiance dit? Car c'est moi qui conduit, jusqu'au bout de la nuit.